Dans les années 1960, les hommes gagnaient en moyenne presque 60 % de plus que les femmes tous postes confondus pour des temps complets, c’est-à-dire sans tenir compte de l’effet du temps partiel. Petit à petit, l’écart s’est réduit pour atteindre 17,4 % selon les données 2020 de l’INSEE (Institut national de la statistique et des études économiques). Le mouvement a pris de l’ampleur à partir des années 1970, quand les générations de femmes scolarisées dans l’après-guerre sont arrivées sur le marché du travail. Il se poursuit, plus lentement, à partir des années 1980.
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Écart de salaire entre les femmes et les hommes (temps complets, en %)

Lecture : en 2020, les hommes touchaient en moyenne des salaires supérieurs de 17 % à ceux des femmes, pour des emplois à temps plein. Rupture de série en 1994.
Source : INSEE.
Les nouvelles générations de femmes sont certes de plus en plus diplômées et accèdent à davantage de postes à responsabilités (elles représentent 42 % des cadres supérieurs), mais la progression reste lente. Pendant le même temps, l’emploi féminin peu qualifié se développe, avec des rémunérations rarement supérieures au SMIC (salaire minimum interprofessionnel de croissance). La situation des femmes sur le marché du travail demeure décalée par rapport à leur niveau de diplôme, surtout pour les plus jeunes. Cela fait bientôt 40 ans que l’on compte plus de femmes âgées de 25 à 49 ans diplômées de l’enseignement supérieur que d’hommes. Parmi les personnes en emploi, la part des femmes disposant d’un diplôme supérieur à un niveau bac + 2 est plus élevée que celle des hommes depuis le début des années 2000.
Ces données ne portent que sur des temps complets et sont donc… incomplètes. Elles masquent l’effet du temps partiel, aux trois quarts féminin. Toutes formes d’emploi confondues, le revenu salarial médian (le salaire, tous temps de travail confondus) des hommes demeure supérieur de 20 % à celui des femmes. Pour partie, le temps partiel résulte d’un choix, mais environ un quart des femmes dans ce cas souhaiteraient travailler davantage.
En outre, la moyenne des salaires cache des écarts pour des temps complets qui s’élèvent avec le niveau de rémunération. Les femmes les moins bien rémunérées en temps complet touchent 95 % du salaire des hommes. L’écart est faible parce que les salaires sont bas et que le SMIC constitue un plancher. En revanche, au seuil des 10 % les mieux rémunérés, les femmes n’atteignent que 82 % des salaires masculins, 79 % pour le seuil des 5 % et 71 % pour le 1 %.
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Rapport de salaire femmes/hommes selon le niveau de salaire (en %)

Source : INSEE, données 2020 pour des emplois à temps plein.
Et demain ? Au rythme de rattrapage des cinq dernières années, il faudrait encore 25 années pour que la rémunération des femmes à temps complet atteigne celle des hommes. Un calcul fragile — rien ne dit que le rythme actuel est destiné à durer — que l’on peut juger très lointain mais qui, dans les années 1980 et 1990, semblait tellement hors de portée que l’on n’y songeait même pas.
Trois grands obstacles restent à lever si l’on veut marcher plus rapidement vers l’égalité des salaires à temps complet [1]. Premièrement, la faible présence des femmes aux postes les mieux payés : pour cela, il faudrait notamment que la mixité des filières les plus sélectives progresse plus vite. Dans ce domaine, la question des écoles d’ingénieurs est centrale. Il faudrait aussi que les entreprises modifient leurs pratiques de promotion, les hommes se cooptant souvent entre eux. Deuxièmement, l’ampleur de l’écart de rémunération entre le haut et le bas de la hiérarchie globale des salaires en France : du fait de leur position dans la hiérarchie de l’emploi, la réduction globale des inégalités globales profiterait d’abord aux femmes. Troisièmement, la dévalorisation salariale des métiers (voire la dévalorisation des métiers eux-mêmes) au sein desquels la part des femmes est plus importante : la crise sanitaire a permis une prise de conscience de leur importance, des revalorisations ont été obtenues mais beaucoup reste à faire.
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Source : cette note est issue d’un partenariat avec le Centre d’observation de la société.
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Sans prendre en compte la question du temps partiel subi, qui resterait entière. ↑