Et si, demain, on se passait totalement d’argent liquide ? Si l’idée pouvait, il y a quelques années, paraître utopique, elle est désormais sérieusement évoquée par des économistes et des responsables politiques. Citons ainsi Christine Lagarde, Michel Sapin [1] ou encore le dirigeant de la Deutsche Bank, John Cryan, qui a affirmé que l’argent liquide pourrait avoir disparu d’ici 10 ans, expliquant qu’il était « terriblement inefficace et cher [2] ». L’option est aussi envisagée par l’économiste en chef de la Bank of England [3] et par le gouverneur de la Banque centrale indienne [4]. Même le célèbre jeu Monopoly proposera bientôt une version sans billets, avec paiements électroniques [5].
Plusieurs motivations expliquent ces déclarations. Tout d’abord, le coût de l’argent liquide. Aux États-Unis, pour la seule année 2016, l’impression de billets représentera 0,4 % du produit intérieur brut (PIB), contre 0,1 % en 1990 [6]. Alors que les marges de manœuvre budgétaires diminuent, les États peuvent donc être tentés de faire des économies sur ce poste.
Surtout, les billets, notamment les grosses coupures, sont de moins en moins utilisés pour faire fonctionner l’économie, et de plus en plus dans le cadre d’activités illégales : blanchiment d’argent, trafic de drogue, mais aussi terrorisme ou travail informel. Selon les estimations de l’économiste Kenneth Rogoff, dès les années 1990, 70 % à 80 % de l’argent liquide des pays de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) sont présents dans l’économie informelle ou en dehors de ces pays [7]. Ainsi, la Réserve fédérale américaine ignore où se trouve la majorité des billets de 100 dollars US en circulation, qui représentent quand même 1 000 milliards de dollars US [8].
Au sein de la zone euro, les billets de 500 euros représentent un tiers de l’argent liquide en circulation, mais rares sont les consommateurs q...