Le temps de travail : une mutation majeure. Une introduction générale

Jean Yves Boulin, Gilbert Cette et Dominique Taddei exposent comment a été conçu ce numéro spécial, quelle est sa logique, et les enseignements majeurs qui se dégagent de l’analyse comparée des évolutions observées et prévisibles en matière de réduction et d’aménagement du temps de travail dans les pays industrialisés.
Insistant sur l’importance qu’il convient actuellement d’accorder à cette question, ils montrent que nous sommes peut-être à une période charnière de l’histoire, engagés dans un processus de transition fondamentale entre une époque, celle de l’ère industrielle durant laquelle le temps de travail linéaire, uniforme, inspiré par un certain mode de production et de relations professionnelles, s’est imposé comme le pivot central autour duquel s’organisait toute la société, et une autre époque marquée par une réduction sensible mais surtout une diversification très importante du temps de travail, un changement rapide de son contenu et de ses formes : le passage d’une temporalité unique – celle aussi du temps imposé sur un mode synchronique – à une temporalité plurielle – celle aussi du temps choisi à des horaires variables.
Question fondamentale des décennies à venir mais question peut-être éphémère à l’échelle des siècles, précisent toutefois les auteurs.
La notion de temps de travail n’a pas toujours existé et n’existera sans doute pas toujours. De sorte qu’à beaucoup plus long terme, la réduction du temps de travail pourrait bien devenir caduque avec  » l’effacement même du travail prescrit « .
À l’image d’un avenir conçu à partir d’une simple extrapolation reposant sur une réduction de plus en plus importante de la durée du travail, ils opposent finalement une autre vision autrement plus révolutionnaire : celle d’un travail si différent que les conceptions aujourd’hui dominantes perdraient tout leur sens. Une utopie ou une question de temps ?