Revue

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De l’origine de la violence à son avenir

L’expansion du terrorisme, des luttes tribales, l’exacerbation des tensions géopolitiques, les craintes d’un effondrement économique ou écologique de grande ampleur placent la question de la violence au premier plan de nos interrogations. Le questionnement est ici rétrospectif autant que prospectif : il touche à l’idée d’une nature humaine, aux conséquences de l’institution de sociétés complexes aussi bien qu’à leur avenir. Sommes-nous, comme le voulait Hobbes, violents par nature ? Par socialisation, dans une veine plus rousseauiste ? À quelles conditions pouvons-nous espérer cohabiter, et si la nature humaine ne peut évoluer, quelles formes d’organisation sociale sont-elles le plus aptes à en désamorcer les dimensions les plus sombres ?

La découverte récente d’un charnier préhistorique au Kenya a relancé le débat sur cette question qui fait tant controverse [1]. La tendance à la violence est-elle ancrée dans la nature humaine ? Les défenseurs de cette option rappelleront que des traces de violence intragroupe apparaissent dès 100 000 ans avant notre ère et qu’elles se multiplient dans les sociétés de chasseurs-cueilleurs du paléolithique moyen et final (- 40 000 à – 10 000). Les autres distingueront les modalités de la violence. Les charniers préhistoriques découverts en Allemagne comme au Kenya [2], diront-ils, datent de périodes plus récentes. Ils sont liés à des circonstances singulières, à la lutte pour la possession des ressources (gibier, poissons), peut-être aux prémices d’une sédentarisation. Selon Marylène Patou-Mathis [3], la guerre proprement dite débute plus tard encore, au néolithique, avec la diffusion de l’agriculture qui fait changer d’échelle les confl...