Le concept d’économie de l’attention formalisé par l’économiste Michael Goldhaber, qui fait de l’attention la denrée la plus rare et la plus précieuse à l’heure où le numérique permet la prolifération de l’information, est depuis des années la base de nombreux travaux. Les effets d’un tel écosystème dans lequel il devient crucial d’attirer l’attention sont eux-mêmes objet de recherches : Katherine Hayles, Bernard Stiegler, Yves Citton, pour ne citer qu’eux, étudient la fragilisation de nos capacités d’attention profonde ou soutenue et appellent à la mise en place de nouveaux régimes attentionnels. Le travail de Matthew Crawford s’inscrit dans cette perspective et poursuit lui aussi un diagnostic, déjà développé dans un précédent ouvrage [1], des effets d’une surexploitation publicitaire de l’espace et du temps.
Le projet de Matthew Crawford se distingue cependant par la façon dont l’auteur, loin d’interpréter la crise de l’attention à l’aune de la seule technique et du seul numérique, relie son analyse à une pensée du corps et de la prax...