Cinquante ans après le premier rapport au Club de Rome — celui de Dennis Meadows, Donella Meadows, Jørgen Randers et William W. Behrens, The Limits to Growth [1] — un nouveau rapport au Club de Rome est paru à l’automne 2022, sous le titre Earth for All: A Survival Guide for Humanity. Sa traduction en français vient de sortir aux éditions Actes Sud.
Rappelons d’abord que le premier rapport au Club de Rome, élaboré au sein du Groupe dynamique des systèmes de la Sloan School of Management du MIT (Massachusetts Institute of Technology), a connu un immense succès mondial puisqu’il s’est vendu à des millions d’exemplaires et a largement contribué au débat alors émergent sur la « croissance zéro ». Ce premier rapport a, depuis, fait l’objet de plusieurs éditions augmentées, notamment des mêmes auteurs : Beyond the Limits en 1992 [2] ; et un autre ouvrage en 2004, traduit en français : Les Limites à la croissance (dans un monde fini) [3].
Le scénario du rapport était construit à partir de cinq variables essentielles faisant l’objet d’une analyse systémique et d’une prévision élaborée grâce à un modèle informatique (le modèle World3 de Jay W. Forrester) destiné à analyser les causes et conséquences à long terme de la croissance démographique et économique sur les ressources naturelles, et la capacité limitée de la Terre à absorber les émissions industrielles et agricoles. Il aboutissait à la conclusion d’un possible effondrement planétaire.
Le nouveau rapport au Club de Rome procède d’une même logique mais prend acte du fait que nous sommes entrés dans une nouvelle ère géologique : celle de l’Anthropocène, marquée par le fait que le principal moteur de changement des écosystèmes et du système terrestre est l’Homo sapiens, c’est-à-dire nous-mêmes. Il prend acte des neuf limites planétaires établies par l’équipe de Johan Rockström et de leur dépassement, à commencer par le changement climatique et l’érosion de la biodiversité qui étaient juste évoqués dans Halte à la croissance ?
En outre, ayant souligné que la planète est confrontée à une métacrise (ou polycrise), il prend en compte deux autres variables : l’une de tension sociale, l’autre de bien-être, celui-ci étant estimé à partir de différents indicateurs tels que le produit intérieur brut par habitant, les services publics, les inégalités, l’espoir pour le futur… Enfin, au lieu de se baser sur des moyennes planétaires, la modélisation est faite distinctement pour 10 grandes régions : Afrique subsaharienne, Asie du Sud, Asie du Sud-Est, Chine, Europe de l’Ouest, Europe de l’Est et Asie centrale, Amérique latine, Moyen-Orient et Afrique du Nord, région Pacifique, et États-Unis.
Deux scénarios sont finalement proposés aux horizons 2050 et 2100. Le premier, dénommé « Trop peu, trop tard », prétend illustrer ce « qui se passerait si le système économique qui gouverne le monde (et désormais la biosphère) continue de fonctionner comme il l’a fait durant les 50 dernières années » ; il conduit à l’effondrement. Le second, intitulé « Pas de géant », décrit ce qui se passerait si « g...