Un an après la deuxième réforme des retraites engagée par la France pour faire face au vieillissement de sa population et aux départs en retraite massifs de la génération du baby boom dans les prochaines années, il y a fort à parier que rien ne sera réglé sur le plan des implications sociales de ce vieillissement. En effet, comme l’indique Anne-Marie Guillemard dans cet article, le vieillissement affecte les sociétés développées dans toutes leurs dimensions (façons de travailler, temps sociaux, cycle de vie, etc.), et mener une réforme des retraites sans y inclure un volet emploi ne peut résoudre l’ensemble du problème.
Dans cet article, Anne-Marie Guillemard fait le point sur cet indispensable volet emploi et, en particulier, sur la gestion de l’emploi des travailleurs vieillissants, au travers d’analyses comparatives des situations des principaux pays développés. Après une présentation de l’évolution sur 30 ans de la participation au travail des plus de 45 ans dans ces pays (essentiellement pays de l’Union européenne, États-Unis et Japon), qui montre bien les disparités de gestion de la seconde partie de carrière des travailleurs, l’auteur propose une typologie des politiques de protection sociale et d’emploi, et des cultures de l’âge ; elle précise l’impact de ces configurations institutionnelles sur l’activité des travailleurs âgés – activité qu’il est indispensable d’encourager dans le contexte du vieillissement démographique.
La France et, plus généralement, l’Europe continentale affichent une culture de la sortie précoce du marché du travail de ces travailleurs seniors, qui a pour conséquence de produire de l’inactivité et qui ne résout pas les problèmes de chômage ; il leur faudra engager une véritable » révolution culturelle » pour inverser cette tendance et se rapprocher des politiques scandinaves en cette matière. C’est en effet l’exemple finlandais de » plan pour l’emploi des plus de 45 ans » qui, selon l’auteur, peut faire figure de modèle et permettre de développer l’apprentissage tout au long de la vie, la formation continue des travailleurs et la remobilisation des seniors dans l’emploi. Cela requiert une politique de l’emploi volontariste, élaborée en concertation avec tous les acteurs sociaux concernés, et l’adoption d’une perspective longue du cycle de vie visant à entretenir l’employabilité et les compétences pendant toute la durée de la vie professionnelle.
Les sociétés à l'épreuve du vieillissement. Le défi de l'emploi en seconde partie de carrière
Cet article fait partie de la revue Futuribles n° 299, juil.-août 2004