Les 1er et 2 décembre 2022 s’est tenue dans les locaux de Futuribles International une nouvelle session de la formation « Futurs de villes. Les villes et leurs acteurs au défi des transitions », animée par Isabelle Baraud-Serfaty, économiste et urbaniste, directrice d’Ibicity. Comme lors de la session précédente, les différentes interventions ont apporté des éclairages thématiques sur quelques-unes des nombreuses facettes de la ville et de la fabrique urbaine aujourd’hui et demain.
Les résumés de ces interventions ont été rédigés par Quentin Bisalli et ne visent en aucun cas à reprendre l’intégralité des propos exprimés : il s’agit ici de garder trace de la spécificité de leur approche. Ces résumés n’engagent pas les intervenants, qui ne les ont pas lus avant publication, et les illustrations en exergue ont été, sauf exception, choisies par Futuribles. Cet article porte sur l’intervention de Charlotte Ruggeri (géographe, chercheuse associée au Laboratoire ville mobilité transport [LVMT] et directrice de la revue Urbanités) consacrée aux villes mondiales de demain.
Charlotte Ruggeri est directrice de la revue Urbanités, revue de géographique gratuite et en ligne fondée en 2012. L’équipe, composée de géographes et d’urbanistes, cherche à aborder la ville sous le prisme des pratiques (de la population, des personnes qui pensent et qui fabriquent la ville), en croisant le monde de la recherche et le monde opérationnel. La revue est alimentée par des entretiens (avec des maires, des géographes…), mais aussi par de longs temps de terrain en immersion [1]. Urbanités propose des formats variés, par exemple des portfolios en grand format donnant une large part à la photographie d’information en couleur.

Source : site de la revue Urbanités, juin 2019.
Peut-on parler de modèles urbains ?
La question est très présente en géographie, notamment dans l’école française, qui se pense en champs territoriaux, avec différents modèles urbains européens, américains, asiatiques, etc. Or Charlotte Ruggeri constate que cette partition assez ancienne est de moins en moins pertinente, du fait de la circulation et des hybridations des formes urbaines. Ainsi, à Hô-Chi-Minh-Ville, la forme traditionnelle de la ruelle vietnamienne côtoie les immenses condominiums à destination des classes aisées. De même, les projets de ville végétalisée ne sont pas ancrés géographiquement, et l’on en retrouve les traces tant en Italie (Bosco Verticale à Milan) qu’en Chine (projet de cité-forêt à Liuzhou). L’exemple des gares et du quartier qui les entoure est lui aussi un enjeu présent un peu partout : les projets américains pour repenser le rôle de la gare en centre-ville s’inspirent ainsi tant de la place historique des gares dans les centres-ville européens que du modèle japonais de la gare comme lieu d’accueil de logements et de commerces. En somme, on peut retrouver les mêmes formes urbaines (types de bâtiments, aménagement de la rue…), mais leurs interrelations et les modèles urbains qui en découlent sont très différents. La place et le rôle des acteurs publics et privés en sont une autre illustration : les modèles nord-américains de fabrique de la ville diffèrent ainsi de ceux que l’on connaît en Europe de l’Ouest par la prépondérance des acteurs privés, dont les méthodes finissent par inspirer les acteurs publics. La place du chemin de fer et l’absence de ga...