Indicateur phare de la santé d’une population, le taux de mortalité infantile [1] est mesuré, en France, grâce aux données de l’état civil publiées par l’Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE). Or, ces dernières révèlent une augmentation significative de ce taux depuis 2012, une situation déjà connue et signalée en 2018 par l’INSEE, mais qui suscite pourtant peu de réactions de la part des pouvoirs publics.
Quelles sont les tendances ?
Plusieurs équipes de recherche issues de l’INSERM (Institut national de la santé et de la recherche médicale), de l’université de Paris Cité, de l’AP-HP (Assistance publique – hôpitaux de Paris) et du CHU (centre hospitalier universitaire) de Nantes, en collaboration avec l’université de Californie, ont proposé en mai 2022 une analyse des données de l’INSEE sur la période 2001-2019, publiée dans The Lancet. En adoptant une méthodologie statistique permettant d’écarter les biais (liés à de potentielles évolutions des pratiques de recension de l’état civil, des pratiques médicales et d’intégration de nouvelles bases de données comme celle en provenance de Mayotte), elles ont recensé un taux de mortalité infantile moyen de 3,63 nourrissons pour 1 000 enfants nés vivants sur 18 ans, avec une inflexion nette à la hausse depuis 2012.
En effet, alors que ce taux avait largement diminué depuis le début du XXe siècle (hors guerres mondiales) ainsi qu’entre 2001 et 2005, il a connu une augmentation de 7 % entre 2012 et 2019, faisant passer la mortalité infantile de 3,5 ‰ en 2012 à 3,8 ‰ en 2019. Et le phénomène semble se poursuivre, puisqu’en 2022, l’INSEE recensait 3,9 nouveau-nés morts pour 1 000 enfants nés vivants. L’étude signale, par ailleurs, qu’un quart des décès sont survenus au cours du premier jour de vie et près de la moitié (47,8 %) dans la première semaine. Enfin, la comparaison avec d’autres pays européens à économie similaire, comme la Finlande ou la Suède, révèle un excès de 1 200 décès de nourrissons de moins d’un an en France, avec un net décrochage du pays par rapport à ses voisins. La France se situe ainsi à la 25e place en Europe.
Évolution de la mortalité infantile en France, 2001-2019

Source : Le Monde, 2 mai 2022 ; données Eurostat.