Jean Yves Boulin montre ici que si toute la vie sociale, depuis les modes de vie jusqu’à l’organisation de la société tout entière, a été structurée à partir d’un modèle unique d’emploi, calé sur des horaires uniformes, la réduction des temps de travail et surtout la diversification des horaires est de nature à entraîner une transformation radicale au plan tant économique que social.
Convaincu que la diversification des temps travaillés se poursuivra, aussi bien en raison des nouveaux impératifs économiques que des évolutions socioculturelles (accroissement du taux d’activité féminine, évolution des structures familiales, aspiration au temps libre…), l’auteur soutient que ” l’organisation standardisée du travail est en voie de dilution ” et qu’au modèle uniforme hier dominant se substituera dans les organisations une gestion beaucoup plus souple des horaires de travail, donc du temps libre et donc une organisation différente des activités jusqu’à présent fortement synchronisées.
La différenciation croissante des temps travaillés et des horaires permettra de remédier aux dysfonctionnements économiques (par exemple en luttant contre les encombrements) et d’améliorer l’efficacité des organisations, tout en conférant aux individus une plus grande maîtrise de leur temps. Mais, suscitant de nouvelles demandes de services, donc de nouvelles consommations de temps de travail, elle aura un effet démultiplicateur conduisant à une désynchronisation encore plus prononcée des horaires… Ainsi l’auteur montre non seulement combien l’aménagement du temps de travail interfère sur celui du temps libre et son usage, mais aussi comment la flexibilité introduite au niveau des conditions de travail par les organisations entraînera, au plan individuel, au niveau de l’entreprise et à celui de la société tout entière, une véritable révolution. La question pendante étant de savoir si la révolution du temps choisi, qu’en définitive pronostique l’auteur, sera également bénéfique pour tous.
L'organisation sociale du temps
This article is published in Futuribles journal no.165, mai-juin 1992