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Droit international de la mer : l’apport de l’accord adopté en 2023

Traité haute mer futuribles
L’accord international qui a été trouvé aux Nations unies sur la « conservation et l’utilisation durable de la biodiversité des zones ne relevant pas de la juridiction nationale » [1] a été adopté par consensus le 19 juin dernier. Il sera ouvert à la signature le 20 septembre 2023.

Selon les termes de Stéphane Dujarric, porte-parole du secrétaire général des Nations unies, on peut y voir une victoire du multilatéralisme onusien, caractérisé par l’égalité souveraine des États. A contrario, il pourrait s’agir d’un multilatéralisme « à la carte » dans le contexte géopolitique mondial tempétueux, en raison notamment du fait que l’accord ne devra pas porter atteinte aux systèmes de gouvernance mondiaux, régionaux et sectoriels préexistants. Après près de 20 ans de discussions techniques et juridiques, « le navire a atteint le rivage », a annoncé Rena Lee (Singapour), présidente de la conférence intergouvernementale (CIG), lors de son discours de clôture le 4 mars 2023.

Les principaux éléments

L’accord BBNJ, une fois entré en vigueur, sera un traité international juridiquement contraignant pour les États qui y seront parties. Il s’agit du troisième accord de mise en œuvre de la Convention des Nations unies sur le droit de la mer (CNUDM). Sa teneur est complexe, à l’instar de sa formation dans le temps.

D’une cinquantaine de pages, il se rapproche des accords environnementaux multilatéraux classiques. Il rappelle certaines règles et principes généraux du droit international de l’environnement, comme le principe du pollueur-payeur, le principe de l’équité et du partage juste et équitable des avantages, le principe ou l’approche de précaution, l’utilisation des meilleures connaissances et informations scientifiques disponibles et l’obligation de ne pas déplacer le préjudice ou les risques et de ne pas remplacer un type de pollution par un autre.

L’accord est composé de 12 parties (voir tableau ci-dessous). Les quatre parties substantielles sont celles sur les ressources génétiques marines et le partage juste et équitable des avantages ; les mesures telles que des outils de gestion par zone, y compris des zones marines protégées ; les évaluations d’impact sur l’environnement ; et le renforcement de capacités et transfert de technologies marines.

Structure du projet d’accord BBNJ

Source : auteurs.

Dans le droit fil de la CNUDM, l’accord témoigne d’une appréhension holistique de la biodiversité marine internationale, par-delà le découpage spatial des mers et des océans et les différents principes juridiques qui leur sont applicables [2]. Il fait écho au préambule de la CNUDM selon lequel « les problèmes des espaces marins sont étroitement liés entre eux et doivent être envisagés dans leur ensemble ».

Les États se positionnent en bons gestionnaires (stewards) de l’océan pour le compte des générations présentes et futures, en protégeant le milieu marin, en prenant soin et en veillant à son utilisation responsable, en maintenant l’intégrité des écosystèmes océaniques et en conservant la valeur intrinsèque de la biodiversité internationale.

Les principales innovations techniques

L’accord porte en germe de multiples innovations techniques pour un traité international en droit de la mer. Il s’agit du premier traité de protection de l’environnement qui s’applique directement au-delà des juridictions nationales plutôt que de réglementer les obligations des États à l’égard des activités, des navires et des personnes relevant de leur juridiction et de leur contrôle [3].

En résonance avec le cadre de la Convention sur la diversité biologique de 1992, il s’applique aux ressources génétiques marines et à leurs informations de séquençage numérique, et il établit u...